Le Plateau de Saclay est présenté comme une « Silicon Valley » française. L’objectif annoncé est de favoriser la création et le démarrage d’entreprises innovantes, exploitant des applications issues de la recherche. En dehors du fait que le modèle californien est extrêmement différent de ce que l’on nous propose, en terme d’étendue, d’imbrication dans la cité, et surtout de gouvernance, il ne faudrait pas croître à une « potion miracle » pour faire pousser des petits Google français.
Thomas Lamarche, qui a étudié les historiques et les fonctionnement des clusters, au niveau mondial, s’est déjà exprimé sur le projet d’aménagement du Plateau de Saclay (Plateau de Saclay: point de vue).
Voici une autre intervention, qui « enfonce le clou », avec l’approche d’un entrepreneur reconnu sur des systèmes innovants.
Pascal Béglin : « une Silicon Valley à la française ne se décrète pas »
Extraits:
Aux Etats-Unis, les startups bénéficient du Small business act, alors qu’en France il y a encore une forte ségrégation anti-PME dans les grands groupes. Déclarer « Saclay est la Silicon Valley à la française » ne sert à rien. Une Silicon Valley à la française ne se décrète pas. Il faut développer les mentalités, le capital-risque, créer un marché de la liquidité. Ce n’est pas une construction ex-nihilo technocratique qui la fera émerger. Il y a un problème de loi : les grandes entreprises doivent se sentir responsables du développement des sociétés de high-tech. La ségrégation est un frein, car il y a un conservatisme français en la matière. On aime les grands champions, qu’on fait grossir, sans conscience que l’innovation vient des petites entreprises. Il faut apprendre à prendre des risques, ou on ne parviendra pas à innover. Les grandes entreprises françaises ne donnent pas l’exemple.
Aux Etats-Unis, jamais je n’ai entendu dire « Vous êtes trop petit », alors que chez nous, la question est systématiquement posée. Il va falloir beaucoup de temps avant que cette discrimination positive arrive en France, et il va falloir que le gouvernement décide de faire évoluer les mentalités par la loi. On parle depuis des années de Small business act à la française, et on l’attend toujours.
Je rajouterais une forme de ségrégation, pénalisant les sociétés françaises par rapport aux américaines. Les produits français souffrent d’une sorte de rejet de principe, les américains étant supposés être plus performants dans des produits technologiques, surtout dans l’informatique. L’influence des cabinets de conseils et des outils de management anglo-saxons y est peut-être pour quelque chose.
Par ailleurs, les gestionnaires et les directions des achats des grandes entreprises françaises ont parfois de telles exigences vis à vis de leurs fournisseurs que les TPE ne peuvent pas leur vendre directement de produits. Le système de référencement des fournisseurs représente une étape difficile à franchir pour de petites structures.
Concernant les marchés publics, l’absence de « Small Business Act » au niveau européen est regrettable. Ces dernières années, j’ai eu l’occasion de rencontrer des entrepreneurs français qui avaient établi une antenne aux USA, pour bénéficier du « SBA » et éventuellement, du financement d’agences, comme la NASA.