L’examen du projet de loi du Grand Paris, avec l’aménagement du Plateau de Saclay, se poursuit au Sénat ce 26 avril. Elle donne lieu d’âpres discussions.
La discussion au Sénat la semaine dernière a été particulièrement houleuse, les élus de gauche reprochant au gouvernement d’imposer un texte qui ne respecte pas, selon eux, les compétences des collectivités. 290 amendements ont été déposés et il reste encore dix articles à examiner, notamment ceux concernant la création d’un pôle scientifique et technologique sur le plateau de Saclay (Yvelines et Essonne).
Fin controversée du projet Arc Express
Le Sénat a voté en séance la disposition adoptée en commission spéciale mettant fin au débat public sur le projet de rocade ferroviaire Arc Express dès la promulgation de la loi alors même que la commission nationale du débat public a validé le 7 avril le dossier de débat public sur ce projet.
Du financement du « Grand Huit »
Les sénateurs ont voté plusieurs taxes nouvelles pour financer la double boucle de métro automatique autour de Paris, qui doit représenter un investissement de 21,4 milliards d’euros.
-taxe sur les plus-values immobilières liées à la création du métro automatique (taxe dont la rentabilité est sujette à discussions), complétée d’une taxe similaire pour les transports en commun en site propre du STIF (Syndicat des Transports Ile de France).
-taxe sur le matériel roulant de la RATP dont le Stif est devenu propriétaire, bénéficiant à la Société du Grand Paris (SGP) chargée de la réalisation de la double boucle. Elle est censée compenser un « effet d’aubaine » lié à la suppression de la taxe professionnelle.
Les sénateurs ont également imposé au gouvernement la remise d’un rapport au Parlement avant fin 2013 évaluant l’état d’application du projet de loi sur le Grand Paris qui détaillera notamment le financement et les capitaux nécessaires à la finalisation du projet.
Logement social
Ils ont aussi renforcé la place du logement social dans le Grand Paris, notamment en exonérant les cessions des biens immobiliers des organismes HLM de la taxe sur la valorisation foncière et ajouté l’obligation de respecter la loi Solidarité et Renouvellement urbains (SRU) dans tous les contrats de développement territorial (CDT) qui seront passés entre l’Etat et les communes dans le cadre des aménagements des quartiers autour des gares du futur métro automatique.
Gouvernance
Enfin, le Sénat a rétabli la limite d’âge de 65 ans pour le futur président du Grand Paris alors qu’un amendement du député Jean-Christophe Lagarde (Nouveau Centre) avait introduit une dérogation.
Cette disposition écarte Christian Blanc de la présidence de la Société du Grand Paris. Mais aussi André Santini, ce qui explique la requête du Nouveau Centre ( En dépit de ses 69 ans, André Santini se rêve en capitaine du Grand Paris).
Mais qu’en sera-t-il de l’Etablissement Public Paris-Saclay ?
Galvanisé par les résultats des dernières élections, Jean-Paul Huchon demande le retrait du projet de loi sur le Grand Paris, à la veille d’un conseil régional qui s’annonce animé. Mais entre l’Etat et la région, un troisième acteur s’immisce : Paris Métropole, qui entend « passer la seconde ».
Jean-Paul Huchon a présenté à la presse ce 14 avril un projet de délibération relative au « respect des principes de la décentralisation » et au projet de loi sur le Grand Paris. Ce dernier constitue selon lui un « déni de démocratie » et il demande purement et simplement son retrait et l’approbation par décret du projet de schéma directeur de la région Ile-de-France (Sdrif).
La reprise de l’examen du projet de loi au Sénat est prévue le 26 avril et la réunion de la commission paritaire devait avoir lieu le 28 avril mais, selon Jean-Paul Huchon, elle se tiendra en mai, « preuve qu’il reste de nombreux problèmes à régler ». Le président du conseil régional a assuré qu’il y aurait de toute façon des recours constitutionnels et que sur un plan strictement juridique, le projet d’aménagement du Grand Paris ne pourrait être mis en œuvre faute d’approbation par décret du projet de Sdrif.
Jean-Paul Huchon a rencontré François Fillon, et demandé l’abrogation du projet. Les relations entre l’Etat et la majorité des Régions sont évoquées, et pourraient être impactées par les suites données au projet du Grand Paris. Jean-Paul Huchon a également défendu le projet de transports de la région, « Arc-Express », moins coûteux et plus rapide à déployer que le projet du « Grand Huit ».
« La majorité est extrêmement en colère contre le projet de loi Grand Paris, la manière dont il a été préparé et aggravé au Sénat. Je lui ai expliqué que pour nous ce projet devait être soit retiré, soit profondément modifié », a affirmé à l’AFP M. Huchon à la sortie d’un tête-à-tête avec le Premier ministre, à l’invitation de ce dernier.
M. Huchon a défendu son projet d’Arc Express qui pourrait, d’après lui, être réalisé plus rapidement et plus efficacement que la double boucle de métro automatique prévue par l’Etat pour un montant de 21,4 milliards d’euros.
L’élu socialiste a estimé que, plus globalement, M. Fillon a senti une grande difficulté avec toutes les autres régions qui parlent d’une remise en cause des partenariats avec l’Etat.
Même les aménageurs émettent des réserves, et se montrent dubitatifs sur le mode de financement par « taxation de la valorisation foncière ». Car il faut d’abord que les promoteurs et aménageurs persuadent les entreprises de s’installer dans les zones concernées. Une histoire d’oeuf et de poule, en gros.
Développement équilibré et dispersé sur tout le territoire ou concentré sur quelques pôles ? Le choix relève plus d’un changement d’époque que d’une idéologie. La méthode mise en oeuvre par Christian Blanc est critiquée parce qu’elle aboutit à la création d’un outil de centralisation, la Société du Grand Paris, un établissement public à caractère industriel et commercial (Epic) dont les décisions d’aménagement primeront sur les autres documents d’urbanisme ; parce qu’elle réserve à la RATP et à la SNCF, sans concurrence, la maîtrise du chantier du métro rapide ; parce que, si la loi est votée, elle gèlera d’emblée tout autre projet de transport ferroviaire dans la région… Parce que, enfin, le projet s’élabore vite et sans grande concertation. « La plupart des économistes savent bien qu’aujourd’hui l’adhésion à un projet est, autant que le projet lui-même, un gage de réussite », conclut, pessimiste, Frédéric Gilli.
C’est une autre menace sur ce projet. La loi de décentralisation définit les compétences de la Région, et le projet de Christian Blanc ne la respecte pas.
Selon la loi, la région Ile de France la seule autorité compétente pour définir la politique des transports en région parisienne.
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Le Monde